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Et tu feras des grandes choses quand t’auras trouvé lesquelles

Casseurs Flowters

Je n’ai jamais été un grand fan d’Orelsan. Pourtant, il est évident que ce type est plein de bonne volonté. Indéniablement, Orelsan a apporté quelque chose de nouveau au rap français, une fraîcheur inattendue, plus au niveau du fond que de la forme. Orelsan pourrait même devenir une légende du rap français s’il ne traînait pas de graves lacunes : un flow incertain, une écriture maladroite et des prods à la qualité oscillant entre l’acceptable et l’inaudible. Mais le personnage est intéressant et les thèmes qu’il aborde sont actuels et fort bien traités. Orelsan est l’archétype même du jeune paumé qui ne sait pas quoi attendre de la vie, mais qui sait ce dont il ne veut pas. La tendance à l’autodestruction des jeunes d’aujourd’hui est un point central des textes d’Orelsan.

Étonnamment, l’album réalisé avec Gringe, ne change pas vraiment la formule installée pendant déjà deux albums par Orelsan. Les couplets de Gringe n’apportent finalement que peu d’originalité et le rappeur se contente de singer le style d’Orelsan. C’est plutôt concernant la forme que l’album des Casseurs Flowters fait plaisir à entendre. Alors que Le Chant des Sirènes se contentait de placer des beats electro dégueulasses, le premier album du groupe fait plus dans l’expérimentation. Des sons pop, sonnant un peu variété, mais aussi des sonorité plus classiques. L’électro est toujours présent mais cette fois le beat est plus lent, moins dance que certains mauvais morceaux d’Orelsan comme Plus rien ne m’étonne.

Paradoxalement, cet album est difficile à aborder alors qu’il s’adresse pourtant à un public jeune, ou en tout cas à de jeunes adultes. Clairement, Orelsan et Gringe n’ont pas cherché à parler aux puristes du rap mais plutôt à la jeunesse française, que l’on sait aujourd’hui en quête d’identité et de valeurs. Pourtant, on ne peut pas dire que les sonorités soient dans l’air du temps, si vous me permettez cette expression. Les musiques sont pour la plupart assez posées et hétérogènes. Rien de très festif là-dedans.

En même temps, l’album des Casseurs Flowters est loin d’être rigolo et léger. Il se pare d’un cynisme bien dosé et d’un humour décalé, certes un peu maladroit, mais relativement efficace. Le disque est à l’image de la jeunesse actuelle, mais aussi à l’image de la représentation que s’en font Orelsan et Gringe, deux adultes refusant de grandir et de s’ennuyer dans la vie de citadin. Ils se battent contre la temps en distordant leur temporalité, en créant un vide autour d’eux qui ne les lie que ponctuellement au triste monde des humains.

Je vais être franc, tout n’est pas bon. Certains morceaux me laissent de marbre, d’autres me gavent vraiment, mais cet album comporte trop de bonnes idées pour être totalement ignoré. Il a toujours les mêmes problème que les autres albums d’Orelsan, mais la sauce prend mieux car les prods sont un peu plus originales et la présence de Gringe casse la routine du flow monocorde d’Orelsan. Une bonne pioche pour les amateurs de rap, mais surtout l’espoir d’un second opus encore meilleur.

 Dans la Place Pour Être, Les Casseurs Flowters, Orelsan & Gringe